Magazine ARTISET_3-2022_Citoyenneté politique et participati

ARTISET 03 I 2022 35 l’habitat protégé auquel on peut s’attendre pour l’avenir n’ait pas été élaboré avec davantage d’attention. Vous considérez donc qu’à l’avenir, même en tenant compte d’un transfert de la prise en soins vers les domaines ambulatoire et intermédiaire, il est peu probable que l’on ait besoin de 683 EMS supplémentaires? Markus Leser – Ces chiffres me semblent sujets à caution. Si, enfin, nous développons effectivement les soins intégrés, auxquels se rattachent également des structures intermédiaires comme l’habitat protégé, il n’y aura pas besoin d’autant de nouveaux EMS. Il faut que nous nous débarrassions de cette façon de penser les soins de longue durée en secteurs fonctionnant en parallèle plutôt qu’ensemble. Il est également grand temps que nous arrêtions de considérer la vieillesse comme une maladie. Vieillir n’est pas une maladie: c’est une étape de la vie. Vous faites référence ici à la vision «Habitat Seniors» de l’association de branche Curaviva? Markus Leser – Ce que nous privilégions dans la vision «Habitat Seniors», c’est le souhait premier des personnes âgées de vivre dans un cadre de vie qui leur convient. Et qu’elles bénéficient des soins, d’un accompagnement et d’autres prestations qui répondent à leurs besoins individuels. Cela requiert la mise en place d’offres diversifiées, reliées entre elles et perméables. Des offres qui relèvent des EMS, par exemple. L’habitat protégé, les structures de nuit et de jour et, bien entendu, les services d’aide et de soins à domicile sont également essentiels. Pourquoi êtes-vous si convaincus que l’habitat protégé va devenir pratiquement incontournable? Daniel Höchli – La vision «Habitat Seniors» de Curaviva est axée sur la demande. Nous souhaitons toutes et tous pouvoir vivre chez soi le plus longtemps possible. Et pour ce faire, l’habitat protégé est souvent mieux adapté que son propre logement. En effet, il offre aux personnes âgées un accès simple et rapide à tous les services dont elles ont besoin, y compris les soins infirmiers. Il offre également des avantages en termes de coûts: les solutions d’habitat protégé ont des frais d’infrastructure moindres que les EMS. Markus Leser – Je suis tout à fait d’accord. Il importe que le politique tienne compte de ces avantages pour poser les bons jalons. Notamment en adaptant les prestations complémentaires, de sorte que les personnes disposant de peu de moyens puissent aussi bénéficier d’une solution d’habitat protégé. Le Conseil fédéral va du reste prochainement présenter un projet de loi dans ce sens. Daniel Höchli – Contrairement à une structure de type EMS, les ensembles de logements protégés peuvent, au besoin, être affectés à d’autres usages. Les soins de longue durée vont surtout connaître une croissance exponentielle dans les vingt à trente prochaines années, et la courbe devrait ensuite s’aplatir. Construire des centaines de nouveaux EMS pour cette seule période n’a pas beaucoup de sens. Pensez-vous que les structures nécessaires pourront être construites à temps pour répondre aux besoins? Markus Leser – Je suis très sceptique. Quelques cantons ont commencé à prendre en compte les soins intégrés dans leurs planifications. Bâle-Campagne, par exemple, mais aussi Saint-Gall et le Tessin. La Suisse romande est souvent plus en avance sur ce plan que la Suisse alémanique, le canton de Vaud tout particulièrement. Mais la volonté politique manque encore trop souvent. Daniel Höchli – Je vois également des défis considérables se profiler. Et ce, indépendamment du fédéralisme et du type de structures pour lesquelles les instances et les personnes en charge se décideront en fin de compte. Nous sommes essentiellement limités par deux facteurs: le personnel qualifié et le financement. À l’heure actuelle, nous ne savons absolument pas comment nous pourrons répondre aux besoins. Le rapport Obsan estime qu’en 2045, le secteur de l’assistance aux personnes âgées et des soins de longue durée représentera pratiquement un quart des coûts de la santé, alors qu’il n’en représente que 15% environ aujourd’hui. Que faudrait-il faire? Daniel Höchli – Un rapport du Conseil fédéral de 2016 annonçait déjà les défis de taille auxquels nous préparer sur le plan financier dans le secteur des soins de longue durée. L’étude Obsan pose désormais les bases nécessaires pour chiffrer plus précisément les besoins en termes de «Il faut examiner d’autres sources de financement, par exemple une augmentation temporaire de la TVA.» Daniel Höchli, directeur d’Artiset Le rapport de l’Obsan 03/22: Besoins en soins de longue durée en Suisse. Projections à l’horizon 2040

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